Lorsque j’ai été élu Président de Société Française de Chirurgie Plastique, Reconstructrice, et Esthétique (SOFCPRE), ce fut un grand honneur et une immense joie de recevoir cette reconnaissance prestigieuse. Cela m’a aussi conduit à mesurer le chemin parcouru au cours des années. Fils de pépiniériste, j’ai appris à greffer enfant (greffer une variété sur un porte-greffe) -à l’âge de 7 ans, auprès de mon père (homme de bien, doté d’une gentillesse et d’une intelligence remarquables) – ; et ce détail peut peut-être en partie expliquer la richesse de mon parcours et de ma carrière. J’ai en effet hérité de mes parents, et de mes grands-parents, l’amour du travail bien fait, et le souci du bonheur de mes semblables. J’ai toujours eu à cœur de donner le meilleur de moi-même. Aussi, j’ai eu la chance d’avoir une scolarité facile et brillante, sous l’œil bienveillant de mon grand-frère Laurent, qui me guidait et me protégeait lorsque j’étais enfant. Fruit épanoui et assumé de l’élitisme républicain, mes enseignants me destinaient plutôt à une carrière d’ingénieur du fait de mes facilités d’apprentissage en mathématiques et en sciences physiques. Mais à l’âge de 16 ans la vocation Médicale m’est tombé dessus. Grâce à un de mes amis, Frédéric Millaud, alors étudiant en 4ème année de Médecine (et aujourd’hui Professeur de psychiatrie à l’Université de Montréal), j’ai pu accueillir cette vocation, l’accepter, l’assumer, et finalement l’embrasser avec passion.
J’ai commencé mes études de Médecine à 17 ans, à Lyon. Mes études se sont passées parfaitement, car j’étais passionné et doté d’une excellente mémoire. Apprendre a toujours été pour moi un plaisir. J’ai été nommé Interne des hôpitaux à l’âge de 23 ans. Reçu en très bonne place (2ème du concours), j’ai pu bénéficier d’une formation remarquable. Bien qu’intéressé par tous les aspects de la Médecine, j’ai choisi la Chirurgie car cette discipline représentait pour moi, la meilleure synthèse entre l’intellectuel et le manuel : l’habileté au service de l’intelligence, combinée à l’efficacité thérapeutique concrète et rapide. En cours d’internat, j’ai eu la chance de découvrir la Chirurgie Plastique, qui m’a littéralement, passionné ; et cette passion reste toujours aussi vive aujourd’hui.
J’ai choisi d’acquérir une formation chirurgicale solide et étendue, ce qui m’a permis d’obtenir le Diplôme d’Etudes Spécialisées (DES) en Chirurgie générale, et le Diplôme d’Etudes Spécialisées Complémentaires (DESC) en cancérologie. Mais, ma voie et ma passion étaient bien la Chirurgie Plastique, Reconstructrice, et Esthétique. Cette spécialité correspondait bien à mes aspirations, à mon amour du Beau et du Bien, et à mes qualités intrinsèques. Ce choix s’est trouvé renforcé par l’apparition du Diplôme d’Etudes Spécialisées (DES) en Chirurgie Plastique, Reconstructrice et Esthétique, qui faisait officiellement de cette spécialité une spécialité à part entière, reconnue par une qualification ordinale, et dont j’ai été le premier diplômé en région Rhône-Alpes (avant cette date, la Chirurgie Plastique était une compétence, et non une spécialité). Ma formation chirurgicale en Chirurgie Plastique, Reconstructrice, et Esthétique, a été riche et variée, auprès de mes Maîtres Lyonnais, très bienveillants avec moi (Dr Charles Masson, Dr Jean-Louis Foyatier, Pr Daniel Cantaloube, Pr Maurice Freidel, Pr Pierre Breton) qui avaient à-coeur de me donner la meilleure formation possible, pour que je devienne le « chef de file » de notre jeune spécialité (« le meilleur de sa génération » comme aimait me présenter, mon maitre et ami, le Dr Jean-Louis Foyatier). Un semestre d’échange à Toulouse auprès de mes remarquables Maitres toulousains (Pr Michel Costagliola, Pr Jean-Pierre Chavoin) m’a permis de compléter ma formation, notamment en Chirurgie Esthétique. Finalement cette formation m’a permis d’acquérir de solides connaissances dans tous les domaines de notre spécialité. Cette formation de Plasticien a également pu bénéficier de nombreux séjours d’études en France, en Belgique (à Bruxelles avec le Pr Madeleine Lejour , qui m’a beaucoup apporté, et qui m’avait, lors du congrès de Lyon de 1998 « passé le témoin » en me confiant l’original de son livre signé par l’éditeur, comme un « passage de relai », dont j’espère avoir été digne), et particulièrement aux USA au sein du département de Chirurgie Plastique de l’Emory university (Pr John Boswick, Pr Foad Nahai), qui était à l’époque le service leader en Chirurgie Plastique dans le monde.
En parallèle de cette formation clinique, j’ai eu la chance d’acquérir une formation étendue en recherche avec l’obtention du Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en Génie Biologique et Médical (GBM) ; puis d’une thèse de Doctorat d’Université ; et enfin l’obtention du diplôme d’Habilitation à Diriger les Recherches (HDR) en juin 1999. Ce goût pour la recherche s’est toujours maintenu, et m’a permis de participer à de nombreux travaux scientifiques cliniques ; mais également de participer à des recherches plus fondamentales en lien avec le CRLCC, en tant que chercheur associé dans l’équipe du Dr Véronique Maguer-Satta.
De retour des USA, où m’avait envoyé mon Maitre Jean-Yves Bobin (Chef de département de chirurgie), j’ai pu immédiatement mettre en œuvre ces compétences acquises, grâce à la très grande bienveillance du Pr Bobin. Ce chirurgien très complet et charismatique m’a en effet fait confiance très rapidement, ce qui m’a permis de développer une expérience assez unique en Chirurgie Reconstructrice. Il m’adressait des cas complexes qu’il recevait de toute la France. En me présentant comme étant au « top niveau » (expression qu’il aimait bien), il m’a aidé incontestablement à acquérir un savoir-faire et une expérience remarquables. Une anecdote me revient : il est arrivé souvent que les patientes, ou aux patients, en rentrant dans mon bureau de consultation disent : « j’avais rendez-vous avec le Dr Delay », « mais je suis le Dr Delay ! » (avec mon jeune âge, et mon look de jeune premier de la classe, les gens en doutaient, et souvent la personne répondait : « Ah, oui ? mais je voudrais voir le père ! » car les personnes s’attendaient à voir un chirurgien d’âge mûr – pour que le « grand » Pr Bobin lui adresse des cas difficiles). Finalement, en expliquant précisément le geste chirurgical et la prise en charge, les patients avaient confiance ; et nous avons connu ensemble de très beaux succès, qui m’ont valu beaucoup de petits cadeaux pour moi, et mes enfants alors en bas âge, qui m’ont souvent accompagné à l’Hôpital pour le « petit tour » du dimanche matin. J’ai développé initialement mon activité en Chirurgie Plastique générale, en microchirurgie, et en chirurgie réparatrice de la face. Bénéficiant de la confiance de mes collègues chirurgiens, en particulier des Dr Michel Rivoire, Rémi Blondet, Patrick Zlatoff, puis du Pr Alain Brémond, j’ai pu rapidement développer une activité chirurgicale importante et novatrice. J’ai choisi la Chirurgie Plastique et Reconstructrice du sein comme sujet principal de recherche clinique car le cancer du sein est le plus fréquent des cancers de la femme, et le recrutement du Centre Léon Bérard était déjà important. La correction des séquelles thérapeutiques après cancer apparaissait de plus en plus importante ; et il était important qu’un chirurgien s’intéresse à ce domaine ; enfin, j’avais eu la chance de bénéficier des enseignements, et du mentorat, du Pr John Bostwick, Maitre mondial en reconstruction du sein, et en Chirurgie plastique du sein.
Ayant eu la chance de développer une activité chirurgicale importante très jeune j’ai pu maîtriser rapidement les techniques chirurgicales les plus complexes. Cela m’a permis d’acquérir de l’assurance chirurgicale, mais surtout de me dégager rapidement des contraintes techniques, pour pouvoir finalement m’intéresser à la personne, ce qui est en final le plus important pour la satisfaction finale des patientes. Ma formation humaine et psychologique s’est faite auprès de mes Maitres chirurgiens, mais également de mes Maitres psychiatres (Pr Devillard, Pr Dalery) au cours de mes études. Cette formation psychologique et cette approche humaine et empathique ont toujours été essentielles pour moi ; mais je dois rendre un hommage tout particulier à mon épouse, le Dr Patricia Pasi-Delay, Médecin psychiatre remarquable qui, par son humanité, sa compétence, et ses qualités relationnelles exceptionnelles, m’a rendu meilleur en tant que personne, et en tant que Médecin.
Je mesure la chance que j’ai eu de bénéficier de cette formation exceptionnelle, que la France (lorsqu’elle est belle, grande, et généreuse) peut offrir à ses enfants les plus brillants et plus méritants. Cette formation d’excellence m’a aussi naturellement préparé à assumer les plus hautes responsabilités, qui viendraient dans l’avenir. J’ai toujours été reconnaissant à la République de m’avoir offert ce cursus remarquable, et c’est pourquoi j’ai tenu à maintenir, tout au long de ma carrière, une activité hospitalière et une activité d’enseignement ; afin de rendre à la République tout le bien qu’elle m’avait apporté.
Cette formation remarquable, et cet environnement bienveillant sous la direction de notre Chef de département, et sous la Direction Amicale et Bienveillante du Pr Thierry Philip, Directeur du Centre Léon Bérard, m’ont permis de prendre, très jeune, des responsabilités importantes en créant l’Unité de Chirurgie Plastique et Reconstructrice du Centre Léon Bérard, dont j’ai été nommé Chef de Service en novembre 1994, avec les encouragements bienveillants du Pr Thierry Philip, qui me sentait prêt à relever ce challenge. En novembre 2024, je passerai le flambeau de Chef de service à l’un de mes adjoints actuels, le Dr Paul Frobert, qui aura la responsabilité de poursuivre le développement du service, et de développer de nouvelles techniques pour que le service reste un service leader en France. Durant ces 30 années, j’ai eu une activité chirurgicale intense, et depuis 1999, j’ai eu la chance de développer une activité libérale à la Clinique Charcot pour développer toute la Chirurgie Plastique, et la Chirurgie Esthétique (en juin 1999, je devais être nommé Pr d’Université en Chirurgie Plastique, Reconstructrice, et Esthétique ; cette nomination ne s’est pas faite pour des raisons politiques locales, et j’ai finalement choisi de mener en parallèle une activité hospitalière, et une activité libérale ; cela m’a demandé beaucoup de travail, mais cela a été finalement une grande chance et une grande opportunité pour moi de connaitre tous les aspects de notre métier). Ces deux activités chirurgicales intenses m’ont conduit à développer une activité importante, et à acquérir une expérience importante (plus de 15 000 interventions majeures réalisées personnellement). Cette expérience importante m’a conduit à la mise au point de nouvelles techniques chirurgicales (une quinzaine de techniques originales), et à réaliser de nombreux travaux scientifiques d’évaluation et de publication. J’ai ainsi participé à la publication de plus 250 articles scientifiques ou chapitre de livres. Ces travaux de recherche clinique, associés à la recherche scientifique menée en parallèle, m’a conduit à la reconnaissance de la profession ; et j’ai eu la grande joie et le grand honneur d’être élu président 2017 de la SOFCPRE (Société Française de Chirurgie Plastique, Reconstructrice, et Esthétique), devenant ainsi un des plus jeunes présidents de cette société scientifique. Depuis cette date, je continue mon travail d’enseignement, d’innovation, et de recherche pour ouvrir de nouvelles voies pour que la Chirurgie Plastique puisse continuer à contribuer au bonheur des êtres humains.
Arrivé aux trois quarts de ma carrière chirurgicale, je peux commencer, avec sérénité, sans prétention mais avec conviction, à avoir une réflexion sur mes engagements, et tenter de préciser mes valeurs et mes choix.
En tant que personne, ma formation classique et mes souhaits sont d’essayer d’être une « belle personne » ce qui veut dire, en suivant « les classiques » d’essayer d’appliquer les 4 Valeurs fondamentales que sont : la sagesse, la tempérance, le courage, et le sens de la justice. Ces valeurs, j’essaie de les appliquer dans ma vie personnelle, mais aussi dans ma vie professionnelle, et ma pratique médicale quotidienne.
En tant que praticien, j’aspire à être un excellent praticien, compétent, compatissant, doté de professionnalisme, de bienveillance, d’aptitudes relationnelles, et aimant partager ses connaissances, en poursuivant mes missions d’enseignement et de transmission de savoir ; tout en essayant d’être un « leader inspirant » pour mes élèves. Je souhaite ici remercier chaleureusement mes élèves, qui m’ont beaucoup apporté par leur dynamisme, leurs questions, et la richesse de leur réflexion. Plusieurs ont des qualités remarquables, et sont prêts à continuer à faire avancer notre belle spécialité, et à prendre également des responsabilités au sein de notre profession.
En tant que chirurgien accompli, j’aspire à être un chirurgien talentueux, aux connaissances étendues permettant de choisir de réaliser la meilleure intervention possible pour chaque patiente, doté d’autorité naturelle (fruit de la compétence reconnue par ses pairs, et du charisme qui l’accompagne), doté de sang-froid, débrouillard, vif d’esprit, plein d’humour, et doué de la capacité à détendre l’ambiance avec une plaisanterie finement placée, permettant ainsi à chaque membre de l’équipe chirurgicale de donner le meilleur de lui-même. C’est en effet dans ce travail d’équipe et d’enrichissement mutuel, que nous réalisons le meilleur travail possible pour nos patients.
En tant que scientifique, je cherche à développer les traits d’un bon chercheur : rigoureux, scientifique, aimant la vérité, et doté à la fois d’une approche globale et d’une approche originale ; avec un bon « zoom » mental, permettant d’appréhender aussi facilement l’essentiel, que les détails importants qui font la différence, et surtout les potentielles voies nouvelles porteuses d’un Avenir meilleur.